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La puissance du non

(Chronique parue dans la Gazette de Montpellier en avril 2017)

Penser positivement, apprendre à dire oui aux opportunités de la vie, bienveillance, bonheur... Certes !

Et en même temps : se repérer, savoir poser des limites, savoir dire “non !”. La clé de l'apprentissage du vélo c'est la confiance que l'on sait freiner, pour pouvoir s'élancer.

Nous sommes le plus souvent éduqués à nous conformer aux attentes des autres, à être "poli","sage". La société que l'on produit ainsi peut ressembler à une masse d'êtres humains comme déportés d'eux-mêmes. Avec un flou sur les situations et une perte de sens à la clé. Marshall Rosenberg, le "père" de la Communication Non Violente, disait : "ne me dis jamais oui quand tu penses non, sinon tu vas me le faire payer très cher". L'invitation est celle de considérer combien un "non" est un grand "oui" à un besoin vital prioritaire. S'autoriser à dire non à l'autre, c'est se dire oui à soi-même, à la vie en soi.

C'est un défi psychologique, car cela peut être vécu comme un aveu de faiblesse, un refus d'aider, de comprendre l'autre, voire comme un désir de nuire. Or dire “non” donne de la valeur à mes "oui". Quand l'autre sait que je sais dire “non”, il peut avoir confiance dans mon "oui".

Bien sûr il ne s'agit pas d'avoir recours à une forme brutale, mais à une forme de clarté, de simplicité.

Formuler un "non" part d'un examen de ce qu'il en est pour soi, et de ce qu'il en est pour l'autre. Il s'agit de vérifier son intention de vouloir du bien. Une façon de dire "non" peut être de partager d'abord combien la demande fait écho pour soi. Combien par exemple "j'aurais aimé partager ce moment avec toi...", et de dire combien "en même temps" autre chose est prioritaire à ce moment-là : "en même temps, j'ai besoin de repos, etc."Ici, l'on apprend à poser et clarifier sans justifier, ce qui reviendrait à attendre une approbation de l'autre. Une autre façon de dire non peut être... de dire "non", tout simplement !

Quand je sais dire non, je sais recevoir un non, car je peux me mettre à la place de l'autre, qui partage tour à tour les mêmes besoins fondamentaux que moi. Comme je sais refuser, je sais entendre un refus sereinement, et même avec gratitude. Je renoue une relation authentique à moi-même et à l'autre. J’ose demander. Je donne de la force aux groupes et de la clarté aux situations dans lesquels j'évolue, au quotidien. Je cesse de procrastiner car je peux me confronter aux situations réelles. Je prends la responsabilité de ce qui m'arrive. Je recontacte le sens de la vie, nourri par la relation équilibrée à l'autre.